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Laurent Cugny
Jazz et proto-jazz en France avant James Reese Europe
On a coutume de dire que le jazz est arrivé en 1918 dans les valises des Harlem Hellfighters du lieutenant James Reese Europe. Mais les choses sont plus complexes. D’une part, il n’est pas certain que la musique jouée par cette phalange soit « du jazz », mais surtout, de nombreuses musiques ont précédé le jazz (ce qu’il est d’usage de nommer le « proto-jazz »), aux États-Unis, mais aussi en France. C’est cet « avant Jim Europe » qui est examiné dans cet article.
Jazz and proto-jazz in France before James Reese Europe
It is usual to say that jazz came up in 1918 with Lieutenant James Reese Europe’s Harlem Hellfighters band. But things are more complex. On the one hand, it is not certain that the music played by this phalanx was "jazz", but above all, many musics preceded jazz (what is commonly called "proto-jazz"), both in the United States and France.
It is this "before Jim Europe" that is considered in this article.
En commençant à consulter systématiquement les sources sur les débuts du jazz en France pour un projet d’écriture d’une histoire générale du jazz en France [1], une phrase revenait invariablement dans la littérature existante : « le jazz est arrivé en France avec les Harlem Hellfighters, l’orchestre militaire de James Reese Europe ». Cette affirmation appelle un certain nombre de questions qui constitueront l’armature du présent texte :
Une dernière question viendra enfin s’ajouter à l’examen rapide de ces quatre interrogations : quelles furent la postérité de la vie et de l’œuvre de James Reese Europe et la trace laissée par son passage en France à la tête des Harlem Hellfighters ?
Auparavant, il est utile d’apporter quelques précisions sur le mot et la chose quand on parle de jazz. La première apparition imprimée du mot repérée aux États-Unis remonte à 1912 [2], même si l’on sait qu’il était déjà en usage dans une certaine langue parlée. Toutefois, cette première occurrence imprimée ne s’applique pas à la musique mais à un sport, le base-ball. « Jazz » est ici un effet qu’un certain lanceur nommé Ben donne à la balle. Il faut attendre le 5 avril 1913 pour que paraisse un article intitulé « In Praise of “Jazz”, a Futurist Word Which Has Just Joined the Language [3] ». Il est bien question cette fois de musique et même d’une description assez clairvoyante d’un phénomène alors émergent.
En France, il faut attendre 1918 pour voir le mot imprimé dans la presse. Une annonce est publiée, simultanément dans Le Figaro et Le Gaulois dans leur édition du 5 février. On peut y lire :
« Aux Folies-Bergère. Ce soir, dans la Revue féérique, l’incomparable comique Grock, le roi du rire, et son partenaire ; l’excellent Vilbert, Germaine Webb, Idette Brémonval, Charlotte Mertens Devilder, etc… Pendant l’entracte, The Sensational Americain [sic] Jazz Band, le triomphe du jour [4]. »
De ce jour, la dissémination du mot « jazz » dans la presse et la littérature française en général ira croissante, sans toutefois que le mot désigne un phénomène bien défini, et cela jusqu’à la fin de la décennie 1920, ce qui rend l’étude du phénomène particulièrement ardue pour cette période [5].
On peut voir au moins trois aspects à cette question.
1. Si l’on se place d’un point de vue à la fois musicologique et téléologique, c’est-à-dire en essayant d’évaluer cette musique à l’aune de ce qu’on l’on sait du jazz et de la conception que l’on s’en fait aujourd’hui, la réponse sera plutôt négative. Ce que l’on peut entendre des formations de Jim Europe dans les enregistrements de 1913-1914 et 1919 s’assimile plutôt à la catégorie générique du ragtime. Différents éléments permettent d’arriver à cette conclusion, principalement, le traitement rythmique, l’absence d’improvisation, le répertoire. Celui-ci, avec ses hymnes, ses ouvertures d’opéra et autres airs connus du moment, s’apparente plus aux ensembles d’harmonie de John Philip Sousa et même Patrick S. Gilmore, qu’à ce qui commence à s’élaborer à la Nouvelle-Orléans durant la même période.
2. Si l’on adopte le point de vue de la réception d’époque, la réponse sera autre. Si elle ne fut pas identifiée comme « jazz », cette musique a indiscutablement produit un effet puissant sur les publics qui ont pu l’entendre en France. Une partie de la force de cet effet a non moins indéniablement été provoquée par la composante afro-américaine. Toutefois, il est difficile d’évaluer la part que la visualité prend dans cette assimilation (combien de Français de l’époque avaient déjà vu un Noir ?).
3. Il est probable par ailleurs que l’insistance du musicien lui-même à souligner l’originalité identitaire de sa formation a pu également jouer dans cette réception et par la suite dans sa réverbération.
La réponse est ici clairement négative. Si l’on considère l’ensemble des musiciens étatsuniens arrivés en France dans les bagages de l’armée suite à l’entrée en guerre de leur pays, on peut distinguer deux catégories.
1. Les ensembles militaires : celui du 15th Infantry Regiment (Colored) of the New York National Guard devenu le 369e Régiment d’infanterie U.S., connu plus tard sous le surnom de Harlem Hellfighters, est loin d’être le seul. Plus de mille musiciens afro-américains appartenant à 27 orchestres sont venus sous l’uniforme. Il n’y a aucune raison de penser que tous aient été inférieurs en qualité à la phalange de Jim Europe. On pourrait citer par exemple le 367th Infantry Band dirigé par Egbert E. Thompson, le 368th Infantry Band du lieutenant A. Jack Thomas, ou encore le 350th Field Artillery Band (les “Black Devils” du lieutenant Tim Brymn) et le 370th Infantry Band (“Old Eighth Illinois” Regiment Band de Chicago, sous la direction George E. Dulf). Il est très probable que la notoriété de Jim Europe acquise à New York, sans dénier le moins du monde ses qualités indiscutables de musicien, d’organisateur et de catalyseur, ont favorisé son élection comme acteur-phare de cette histoire.
2. De nombreux entertainers ont été commissionnés par les autorités pour venir soutenir le moral des troupes. Ils ont été le plus souvent oubliés de l’histoire, mais l’une d’entre elles, Elsie Janis, a laissé une trace sous la forme d’un témoignage publié en 1919 [6] où elle conte par le menu ses prestations devant les soldats et le puissant effet qu’elles pouvaient créer notamment en éveillant chez eux la nostalgie du pays. Mais il très possible qu’elle ait également été entendue par des soldats ou des civils français. Si la musique était certainement très éloignée du jazz (mais peut-être pas tellement plus que les orchestres afro-américains), on peut estimer que ces artistes ont aussi contribué à diffuser au moins une certaine musique populaire étatsunienne que les Français ont pu percevoir comme différente de ce qu’ils avaient l’habitude d’entendre.
Réponse à nouveau négative. Il faut tout d’abord garder à l’esprit que les musiciens « populaires » voyagent énormément, même à ces époques précédant l’avènement de l’aviation civile. Des musiciens afro-américains dès le début du XXe siècle sont repérés en Russie, en Australie, en Chine et sur toute la planète [7]. Pour ce qui concerne la France, un foyer afro-américain va se développer tout au long de l’après-guerre à Paris, dans le quartier de Montmartre. Plusieurs centaines de musiciens afro-américains y seront de passage et certains s’y établiront pour de longues périodes, voire s’y installeront plus ou moins définitivement [8].
L’un d’entre eux se distingue particulièrement, le batteur Louis Mitchell. Venant de New York et passant d’abord par Londres, il fait un premier séjour à Paris en novembre 1916. Il reviendra en novembre 1917 pour y rester jusqu’au début de la décennie 1930. Il se produit alors à l’Alhambra avec un orchestre entièrement composé de musiciens afro-américains, les Seven Spades, le 16 novembre très exactement. Il livrera plus tard un témoignage sur ces débuts parisiens :
« Alors même que nous avions créé la sensation en Angleterre, à ma grande surprise les Français, ne connaissant rien du jazz américain, nous ont hué lors de notre premier passage. Cela m’a brisé le cœur. J’ai pensé que j’étais fini et j’étais prêt à faire mes valises et repartir à la maison. Mais le directeur est venu en coulisses et m’a dit que je tenais la plus grande sensation qui avait jamais touché Paris. Je me suis remonté un peu, j’ai écouté son avis et modifié un peu mon numéro [9]. »
Le changement est une réussite : quelques années plus tard, un correspondant du Chicago Defender, Edgar A. Wiggins note que « après avoir changé leur programme, pour le bénéfice de ces gens qui n’avaient vu ni entendu rien de semblable auparavant et ne pouvaient comprendre, pour dépasser la désapprobation et les sifflets de leur première apparition en matinée, ils créèrent la sensation ce soir- là [10] ». L’engagement est étendu à huit semaines.
Les Seven Spades et Louis Mitchell ont donc réussi leur implantation en France. Le 25 janvier 1918, ils font leurs débuts à l’Olympia avec dans le programme une mention en anglais : « The Seven Spades – Combination of Rag-Times, singers, dancers and instrumentists presented by Mitchell, the premier trap-drummer [11] ». En mars, ils apparaissent dans la revue Ramasse-les donc ! au Nouveau Théâtre Caumartin et le batteur ne cesse à partir de ce point d’honorer divers engagements [12].
Louis Mitchell deviendra par la suite la plaque tournante des musiciens afro-américains arrivant à Paris en les aidant à leur première installation, les mettant en contact avec les autres musiciens, les assistant pour trouver du travail, etc. Il ouvrira plusieurs établissements à Montmartre et en viendra même à cesser son activité musicale pour s’occuper à plein temps de ses affaires. En 1929, il décide toutefois de remonter un orchestre de dix musiciens, intitulé Jazz Kings, qu’il présente en mars au El Garron, rue Fontaine. Il ne renonce pas aux affaires pour autant : après avoir imaginé ouvrir une agence pour les musiciens afro-américains arrivant en Europe [13], il reprend un nouveau club, le Plantation, qu’il inaugure en décembre 1929 et pour lequel il embauche les Versatile Four, un groupe déjà vétéran comptant plus de treize années d’existence. Mais entre temps le crash de Wall Street est advenu et a considérablement ralenti le flux des riches Étatsuniens qui venaient dépenser leur argent à Montmartre. Le Plantation doit fermer dès janvier 1930, après seulement sept semaines d’activité. Louis Mitchell reste encore huit mois à Paris avant d’être affranchi d’une charge de faillite et de rentrer aux États-Unis où il restera jusqu’à son décès en 1957.
Certains événements, certains acteurs, s’ils n’appartiennent pas en tant que tels à l’histoire du jazz, n’en ont pas moins préparé cette « arrivée ». Je me permettrai ici de renvoyer à mon ouvrage dans lequel j’ai étudié cette période « pré-jazz » en France. Parmi ces événements et en procédant à rebours chronologiquement, on peut évoquer :
Qu’en est-il de la postérité de cette aventure des Harlem Hellfighters ? On sait que James Reese Europe disparaît prématurément, à la suite d’une rixe avec l’un de ses musiciens, le 9 mai 1919. On notera d’abord que les traces écrites contemporaines de son passage en France sont rares. L’épisode le mieux documenté est le concert inaugural de Nantes du 12 février 1918 et les mentions qui en sont faites dans la presse locale [16]. Aux États-Unis, l’écho est également limité, avec un article recensé [17]. Finalement, la meilleure source est Europe lui-même qui donne une longue interview à un journaliste, laquelle sera publiée en 1919 [18]. On y découvre un musicien qui sait très bien parler de lui-même et valoriser son action. En témoigne par exemple cet extrait :
« Le Noir aime tout ce qui est particulier en musique, et ce “jazzing” exerce sur lui un fort attrait. Cela s’accomplit de plusieurs façons. Avec les cuivres nous mettons des sourdines et faisons tournoyer notre langue, tout en soufflant avec la pression maximum. Avec les bois, nous pinçons le bec et soufflons fort. Cela produit le son particulier que vous connaissez tous. Pour nous, ce n’est pas discordant, car nous jouons la musique comme elle est écrite, à l’exception près que nous accentuons fortement des notes originellement sans accent. Il est naturel pour nous de le faire ; c’est, de fait une caractéristique musicale raciale. Je dois convoquer une répétition quotidienne pour empêcher mes musiciens d’ajouter plus de choses que je ne le veux. Chaque fois que c’est possible, ils enjolivent leurs parties de façon à produire des sons nouveaux, particuliers. Certains de ces effets sont excellents, d’autres ne le sont pas, et je dois rester constamment sur le qui-vive pour sélectionner les résultats de l’originalité de mes musiciens [19]. »
Dans le même texte, il se fait lui-même documentariste de deux des moments forts du passage de l’orchestre en France, un concert au Théâtre des Champs-Élysées et la prestation en plein air dans le cadre d’une grande fête des soldats organisée par la Y.M.C.A. au Jardin des Tuileries en accompagnement d’une conférence alliée se tenant à Paris le 25 août 1918 :
« Ce qui devait être notre seul concert [à Paris] se tint au Théâtre des Champs-Élysées. Avant que nous ayons joué deux morceaux, le public devint fou. Nous avions conquis Paris. Le général Bliss et les officiers français qui nous avaient entendus insistèrent pour que nous restions à Paris et nous restâmes huit semaines. Chaque fois que nous donnions un concert, c’était l’émeute, mais le moment suprême vint au Jardin des Tuileries quand nous donnâmes un concert en conjonction avec les plus grands orchestres du monde – l’orchestre des Grenadiers Britanniques, l’orchestre de la Garde Républicaine, et l’orchestre Royal Italien. Mon orchestre, bien sûr, ne pouvait se comparer avec aucun de ceux-ci, mais la foule, et c’était une foule telle que je n’en n’ai jamais vue ailleurs dans le monde, les déserta pour venir nous entendre. Nous jouâmes pour 50 000 personnes au moins, et si nous l’avions voulu, nous jouerions encore [20]. »
Un grand silence va pourtant succéder à l’ouverture de cette courte fenêtre médiatique. Il faut attendre que deux membres de l’orchestre écrivent leurs mémoires pour que le souvenir de l’épisode des Harlem Hellfighters refasse surface. En 1942 Noble Sissle publie un texte qui, à notre connaissance, n’a jamais paru en édition papier, mais se trouve aujourd’hui en ligne sur le site de la Library of Congress [21]. Il faut attendre 1974 pour voir paraître un témoignage imprimé d’un participant, Arthur Little [22]. Pourtant, Jim Europe a reparu à une occasion dans l’imaginaire collectif sous la forme de son personnage joué par l’acteur Ernest Whitman dans le film Stormy Weather, réalisé par Andrew L. Stone et sorti en 1943. Viendra enfin le temps de la recherche historique avec la publication d’un article dans la revue Black Music Research en 1987 [23] et la publication de la biographie qui fait aujourd’hui autorité, signée de Reid Badger et publiée en 1995 [24]
En guise de conclusion très provisoire, on peut poser deux questions.
Il convient certainement d’éviter un double écueil, de sur- et de sous-évaluation.
Sur-évaluation : l’orchestre a joué un grand nombre de fois sur le territoire français, pour des soldats, le plus souvent devant des publics locaux dans des prestations en plein air plus ou moins improvisées (quais à Saint-Nazaire ou Brest, places publiques, quais de gares, Jardin des Tuileries, etc.). Quelques rares concerts ont été donnés, dont sont restés ceux du Théâtre Graslin à Nantes et du Théâtre des Champs-Élysées à Paris. Il est difficile d’estimer le nombre de spectateurs français qui ont pu entendre la formation en ces occasions. Peut-être quelques milliers ou entre une et deux dizaines de milliers. Le tout dans une période d’un peu moins d’un an. C’est relativement peu, comparé à l’activité quotidienne de music-hall à Paris sur des périodes comparables, où ont été entendus, non seulement Louis Mitchell, mais nombre d’attractions que l’on peut faire figurer au nombre de celles qui ont « introduit le jazz » en France.
Sous-évaluation : il n’en reste pas moins que cet épisode a eu une existence bien réelle et a incontestablement constitué un événement marquant certains esprits, même si la trace s’en est pratiquement totalement effacée une fois les musiciens remontés sur les bateaux les ramenant chez eux.
Quant à une dernière objection qui pourrait être faite, selon laquelle la musique des Harlem Hellfighters ne serait pas du jazz mais du ragtime, elle doit être elle aussi relativisée. Si elle est juste musicologiquement, elle doit pourtant être replacée dans le contexte d’une époque où le concept recouvre des réalités musicales très diverses qui ne correspondent pas à l’idée que nous nous faisons aujourd’hui du jazz. Si l’on considère un ensemble plus large des musiques populaires afro-américaines, alors incontestablement cette musique en fait partie et il est non moins évident que sa présence en France en était alors à ses tout débuts. Ce qui autorise à considérer que l’argument n’a pas de réelle pertinence.
On remarquera enfin que la redécouverte, dans les années 1980 et 1990 de la figure de James Reese Europe et de l’épisode des Harlem Hellfighters correspond justement à celle d’une relecture des musiques afro-américaines. La conception du jazz impliquant le primat de l’improvisation, la naissance quasi exclusive à la Nouvelle-Orléans aux côtés de quelques autres attributs, a pu occulter tout une autre face de la naissance d’une musique populaire afro-américaine du XXe siècle où l’écriture l’emportait, avec des phénomènes comme la création du Clef Club, dont Europe fut le fondateur et l’animateur pendant plusieurs années, et l’importance de New York comme centre de cette tendance avec notamment l’émergence d’un Black Broadway que Europe n’a pu voir du fait de son décès prématuré, mais dont il fut indéniablement un précurseur.
Plusieurs facteurs ont pu mener à ce paradigme historique largement consensuel :
– La notoriété de Jim Europe au moment au moment de sa venue
Si le personnage était probablement totalement inconnu en France lors de son arrivée, ce n’était pas le cas aux États-Unis. La chaleur de l’accueil qui lui fut réservé ainsi qu’à son unité lors de la grande parade de Broadway à Harlem au retour en 1919, doit sans doute beaucoup à cette notoriété acquise avant-guerre. Si cela n’a pas empêché une longue traversée du désert mémorielle, la réémergence des années 1980-1990 s’explique au moins autant par sa carrière jusqu’à 1918 que par l’épopée des Hellfighters.
– Dissémination
Contrairement à un musicien comme Louis Mitchell, l’orchestre s’est produit dans toute la France et dans des lieux très variés. Si numériquement, le public touché n’est pas très vaste, on peut estimer que sa dissémination sur tout le territoire national en a fait un ferment que ne pouvait être une scène parisienne largement autonome et coupée des provinces.
– Aptitude à la communication de son chef
Il est indiscutable que Jim Europe est un « homme de médias » comme on dirait aujourd’hui. Il a su écrire sa propre histoire, dans le très court temps qui devait précéder son décès.
– Disparition précoce
La précocité et les circonstances dramatiques de cette disparition ont favorisé la construction d’une légende. Si elle aurait pu aboutir à un oubli total, il n’en fut pas ainsi et la redécouverte doit certainement beaucoup au romanesque d’une existence afro-américaine hors-norme et brutalement interrompue.
[1] Cugny, 2014.
[2] Anonyme, 1912.
[3] Hopkins, 1913.
[4] Le Figaro, 5 février 1918, p. 4, Le Gaulois, 5 février 1918, p. 3. L’annonce est identique dans les deux organes, sinon que l’orthographe American est rétablie dans Le Gaulois. Elle apparaît également dans l’édition du 7 février de La Presse. et dans celle du 8 février de L’Intransigeant
[5] Voir Cugny, 2014, p. 133-145.
[6] Janis, 1919.
[7] Voir à ce sujet notamment les travaux de Mark Miller (Miller, 2005) ou de Rainer E. Lotz (Lotz, 2013).
[8] Voir Cugny, 2014, p. 179-198.
[9] Interview de Louis Mitchell de 1940, in Miller, 2005, p. 181.
[10] Miller, 2005, p. 39.
[11] Averty, 1993. La prestation est aussi signalée dans Excelsior, n° 2628 du 25 janvier 1918 (p. 5) : « Les 7 Spades, chanteurs, danseurs et instrumentistes américains présentés par Mitchell ».
[12] Dans son numéro du 9 avril 1918, Le Figaro indique : « Au Théâtre Caumartin, la revue Ramasse-les donc ! […] continue à obtenir un grand succès […] et le public fait fête à la fameuse Jazz-Band des joyeux nègres de New-York » (p. 4).
[13] À propos d’un passage à Paris fin 1926, Garvin Bushell note : « Louis Mitchell fut notre guide à Paris. Il s’est occupé de nous pendant notre séjour et essaya de nous convaincre de rester » (Bushell, 1998, p. 68-69).
[14] Dans le numéro de Gil Blas daté du 20 avril 1903, il déclare : « Enfin !… le roi de la musique américaine est dans nos murs ! C’est-à-dire que M. J.-P. Sousa “and his band” va, pendant toute cette semaine, nous révéler les beautés de la musique américaine avec la manière de s’en servir dans les meilleures sociétés. Il faut, à vrai dire, être singulièrement doué pour conduire cette musique. C’est ainsi que M. Sousa bat la mesure circulairement, ou bien secoue une imaginaire salade, ou balaie une invisible poussière et attrape un papillon sorti d’un tuba-contrebasse » (repris dans Debussy, 1987, p. 157).
[15] L’Illustration, n° 72, Vol. III, 11 juillet 1844. Voir Cugny, 2014, p. 67-78.
[16] Annonce du concert dans L’Ouest-Éclair du 11 février puis compte-rendu dans le numéro du 14.
[17] « 15th Regiment Give Concert in France », New York Age, 1918, p. 6.
[18] Grenville Vernon : « That Mysterious Jazz », New York Tribune, 30 mars 1919 ; republié avec des modifications mineures dans Vernon, 1919.
[19] « A Negro Explains “Jazz” », The Literary Digest, 26 avril 1919, in Walser, 1999, p. 13.
[20] Ibid.
[21] Sissle, 1942.
[22] Little, 1974.
[23] Welburn, 1987.
[24] Badger, 1995.
Professeur des universités à l’Université Paris-Sorbonne, musique et musicologie.
Directeur de publication de la revue « Les Cahiers du jazz » (2004-2006).
Coordinateur du projet « Histoire du jazz en France », soutenu par l’Agence Nationale de la Recherche (2009-2011).
Principales publications :
Las Vegas Tango - Une vie de Gil Evans (éd. P.O.L., 1989).
Electrique - Miles Davis 1968-1975 (André Dimanche, 1993).
Analyser le jazz (Outre Mesure, 2009).
Eurojazzland (Northeastern University Press), 2012, ouvrage collectif, coordination avec Luca Cerchiari et Franz Kerschbaumer.
La catastrophe apprivoisée, (Outre Mesure, 2013), ouvrage collectif, coordination avec Vincent Cotro et Philippe Gumplowicz.
Histoire du jazz en France – Tome 1 : du milieu du XIXe siècle à 1929, (Outre Mesure, 2014).
Musicien :
Concerts et enregistrements avec Gil Evans (1987)
Directeur musical de l’Orchestre National de Jazz (1994-1997)
Opéra-jazz « La tectonique des nuages », Grand Prix de l’Académie du jazz (2010).
Anonyme, « Ben’s Jazz Curve », Los Angeles Times, 2 avril 1912.
Averty, Jean-Christophe, Histoire du jazz français 1 1917/1940, film documentaire, Production France 3, Canal Plus, P.B. Productions, SFP, INA Entreprise, 1993.
Badger, Reid, A Life in Ragtime : A Biography of James Reese Europe, New York, Oxford University Press, 1995.
Bizet, René, « Le music-hall – Au Casino de Paris », L’Intransigeant, 30 nov. 1918, p. 2.
Bushell, Garvin, Jazz from the Beginning, New York, Da Capo, 1998.
Cugny, Laurent, Une histoire du jazz en France – 1. Du milieu du XIXe siècle à 1929, Paris, Outre Mesure, 2014.
Debussy, Claude, Monsieur Croche, et autres écrits, Paris, Gallimard, 1987 [1971].
Hopkins Ernest J., « In Praise of “Jazz”, a Futurist Word Which Has Just Joined the Language », San Francisco Chronicle, 5 avril 1913.
Janis, Elsie, The Big Show : My Six Months with the American Expeditionary Forces, New York, Cosmopolitan Book Corporation, 1919.
Little, Arthur W., From Harlem to the Rhine, New York, Haskell House, 1974.
Lotz, Rainer E., Black Europe, Holste-Oldendorf, Bear Family, 2013.
Miller, Mark, Some Hustling This ! – Taking Jazz to the World 1914-1929, Toronto, The Mercury Press, 2005.
Sissle, Noble, Memoirs of Lieutenant “Jim” Europe, manuscrit non publié, ca 1942 [En ligne] <http://memory.loc.gov/cgi-bin/ampage?collId=musmisc&fileName=ody%2Fody0717%2Fody0717page.db&recNum=0&itemLink=%2Fammem%2Faaohtml%2Fexhibit%2Faopart7.html%400717&linkText=9>
Vernon, Grenville, « A Negro Explains “Jazz” », The Literary Digest, 1919, p. 28-29.
Walser, Robert, Keeping Time : Readings in Jazz History, New York, Oxford University Press, 1999.
Welburn, Ron, « James Reese Europe and the Infancy of Jazz Criticism », Black Music Research Journal, 1987.
Pour citer l'article
Laurent Cugny : « Jazz et proto-jazz en France avant James Reese Europe » , in Epistrophy - Quand soudain, le jazz ! / Suddenly, jazz !.03, 2018 - ISSN : 2431-1235 - URL : https://www.epistrophy.fr/jazz-et-proto-jazz-en-france-avant.html // Mise en ligne le 2 juillet 2018 - Consulté le 2 décembre 2024.